Etape 26 : Refuge du portillon - Refuge d'Estos
Vendredi 8 Juillet 2016
Etape 26 : Refuge du Portillon – vallon de Litérole – Pic Royo 3121m – col supérieur de Litérole – Pic Perdiguère 3222m – Pic Hito occidental Perdiguero 3176m – collada Ubaga – coma de Perdiguero - GR11 – Refuge d’Estos
Cette étape orientée Nord-Sud a pour principal objectif de nous faire repasser sur le versant Sud en Espagne. Nous allons profiter de gravir au passage au moins un sommet pour enrichir nos connaissances. Autour du lac du Portillon, neuf sommets principaux dépassent les 3000 mètres. Le plus élevé étant le Perdiguère, qui avec ses 3222m, règne sur cette cour des « grands » des Pyrénées ; voilà un objectif tout trouvé.
Levés à 6 heures, la journée est déjà placée sous le signe de la pluie. Qu’importe, il nous faut traverser cette muraille de roche, alors à 7h30 nous quittons le refuge sous les gouttes d’eau. Comme prévu, le sentier qui domine le lac du Portillon est très glissant, donc progression lente.
Ambiance de fin du monde au lac du Portillon
A l’aplomb du vallon inférieur de Litérole réside un immense névé gelé dont la pente déversante vient mourir dans le lac. L’usage des crampons est indispensable car toute chute entrainerait un plongeon dans les eaux glaciales du lac. Une fois cette difficulté derrière nous, la suite n’est qu’une succession de montées de terrils que sont les moraines glaciaires. Le terrain est plutôt croulant donc énergivore. La pluie cesse durant la remontée du vallon de Litérole, alors rien ne s’oppose à faire un détour pour gravir un sommet supplémentaire. On incline aussitôt notre marche sur notre gauche pour se hisser directement et sans hésitation sur la cime du pic Royo culminant à 3121 mètres. Chose faite à 9h29 pour seulement 1h51 de montée continue. Le sommet est très flou, on cherche même le point culminant. De ce promontoire, on a une vue dominante sur la partie supérieure que l’on a parcourue la veille. L’ibon blanco de Litérole à nos pieds porte bien son nom.
Pic Perdiguère et au loin massif des Posets vus depuis le pic Royo
Le temps d’observer le Perdiguère face à nous au Sud et on prend sa direction. La courte arête qui plonge sur le col supérieur de Litérole se descend parfaitement bien. Nous ne faisons que passer au col supérieur de Litérole à 10h04, et l’on engage immédiatement l’ultime ascension du Perdiguère. Le meilleur itinéraire est indiqué par quelques cairns qu’il ne faut pas perdre de vue. Même s’il n’y a pas d’obstacle technique, cette montée demande de poser les mains en permanence afin de se stabiliser au milieu des gros blocs qui composent ce flanc déstructuré.
Le piolet sera aussi utile pour sécuriser le passage de deux névés sévèrement inclinés. On atteint les 3222 mètres du sommet du Pic Perdiguère à 10h45 après 2h32. Quelle vue depuis ce seigneur Luchonnais ! L’Aneto à l’Est nous offre un profil que nous ne lui connaissions pas ; le Mont Valier ferme l’horizon sur l’Ariège. Tout proche, le sombre massif des Posets est imposant, impressionnant, inquiétant même tant il parait tentaculaire. Au loin vers l’Ouest, le massif du Mont-Perdu se perd sous les nuages. Nous avons là tous les plus hauts sommets des Pyrénées sous nos yeux contemplatifs.
Après 20 minutes d’extase, on reprend la marche par la descente de l’arête Est. Nous entrons ainsi pour plusieurs jours en Espagne. Cette arête est une large croupe qui nous mène gentiment sur le sommet du Hito occidental Perdiguero en 2h50. Il est alors 11h20, nous prendrons le repas sur place. Voilà trois sommets de plus de 3000 mètres gravis malgré la météo menaçante du matin. On peut dire que la journée est déjà réussie.
Le Perdiguère depuis le Hito
On repart à 11h58 en suivant la crête, dans un premier temps facile. De trop nombreux cairns sèment le doute sur le meilleur itinéraire à suivre. On reste sur le flanc Nord jusqu’à finalement perdre les cairns. On trouve alors une sente d’abord facile sur le versant Sud, mais cela va nous mener dans une impasse de façon irréversible. Nous savons à présent qu’il fallait rester sur le flanc Nord bien moins piégeux. A présent, nous sommes enfermés dans une cheminée très étroite et rendue glissante par la pluie qui s’invite au plus mauvais moment. Le passage est réellement accidentogène ; nous ne sommes visiblement pas sur l’itinéraire. Impossible de remonter, il nous faut coûte que coûte descendre. A force de patience et de techniques de désescalade plus ou moins académiques, on arrive à sortir de ce faux pas. Ouf, soulagé d'être sortie indemne de ce piège. Puis la pluie cesse et nous parvenons alors au collado Ubaga à 13h24 en 4h01, sous l’imposant pico Perdigueret.
Collado Ubaga
Alors que nous pensions arriver sur un terrain plus roulant, il n’en est rien. La suite de la descente doit s’effectuer dans un pierrier instable et croulant. C’est affreux pour les chevilles ! C’est fatigant, vraiment fatigant de jouer à ne pas perdre l’équilibre et à chercher sans arrêt son « chemin » dans ce labyrinthe de roche. C’est autant fatigant physiquement que psychiquement.
Quand nous sortons de ce champ de blocs, le plancher des vaches est le bien venu. De nombreuses marmottes peu farouches nous accueillent pour le plus grand plaisir des photographes que nous sommes. Aux alentours de 2000 mètres, la pluie vient à nouveau nous inciter à allonger le pas, mais ce ne sera que de courte durée une fois encore.
Durant la partie de sentier qui plonge en forêt, nous croiserons un chevreuil, rencontre plutôt rare à ces hauteurs dans les Pyrénées. Enfin, on débouche dans des pâturages ; on croise les ruines des anciennes granges d’Estos et nous voilà sur le sentier du GR11. Enfin du repos pour le corps et l’esprit, puisqu’il suffit de se laisser guider par les balises rouges et blanches. Bien que les balises soient rares, et c’est un euphémisme quand on parle du GR11, cela n’insuffle pas le moindre doute quand à la fin de l’itinéraire.
Une solide passerelle permet de traverser le rio Estòs, et nous met au pied de l’ultime remontée du jour vers le refuge éponyme. La pluie reprend du service une nouvelle fois mais rien de très dérangeant.
Le sentier est vraiment fleuri, très fleuri. Que c’est beau ce festival de couleurs. Les iris des Pyrénées sont les fleurs les plus spectaculaires, mais nous trouverons aux abords du refuge, les premiers lys Martagon depuis que nous avons entrepris cette traversée en 2013. Ce passage fleuri nous aidera à faire passer plus vite cette ultime montée. Nous arrivons finalement au refuge à 16h35, concluant cette journée de 6h55 de marche. La bonne surprise qui nous attend est une douche chaude et gratuite. C’est appréciable, car ce sera le seul moment de détente. Le refuge est rempli d’Espagnols bruyants et indisciplinés. Les discussions portent bien évidemment sur la météo du lendemain qui conditionnera la suite de l’itinéraire. Si beau temps nous viserons la cime du Posets, si mauvais temps ce sera le GR11 via le puerto de Chistau. La technologie internet viendra donner un bon indice, il doit faire beau pour les jours suivants. Coucher à 21h30 dans un dortoir bondé, la nuit sera chaude et le sommeil réparateur.
La journée en chiffres :
Temps de marche : 6h55 - Distance : 15,7 km - Vitesse : 2,9 km/h
Dénivelé positif : 967m - Dénivelé négatif : 1511m
Altitude maxi : 3222m - Altitude mini : 1802m
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