Traversée des Pyrénées entre GR et HRP

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Etape 37 : Refuge de Pombie - Refuge d'Ayous

vendredi 14 Juillet 2017

Etape 37 : Refuge de Pombie – col Suzon – pic du midi d’Ossau (2884m) – refuge de Pombie – col de Peyreget – cabane de Peyreget – cabane de Cap de Pount – Refuge d'Ayous

 

L’Ossau, l’élégant et prestigieux Ossau, est une cheminée de volcan. Le pic est considéré par beaucoup comme l’un des plus esthétiques des Pyrénées. Pour les Palois c’est le paradis de la grimpe, et tout pyrénéiste qui se respecte, se doit de l’avoir gravi au moins une fois. Il paraît redoutable et presque inaccessible. Une montagne inhumaine, inviolable, décharnée. Une montagne enfantée par des géants ou des Titans déments…telle était la croyance depuis des temps immémoriaux. Contrairement à de nombreux sommets emblématiques, l’Ossau ne se laisse aborder « aisément » que par un seul cheminement. C’est ce « aisément », fait de 3 cheminées que nous allons tester. J’ai tout lu et tout entendu sur ces cheminées. Certains écrivent que c’est de l’alpinisme pur où la corde est obligatoire, d’autres disent qu’en posant un peu les mains ça passe facilement. Nous ambitionnons de le gravir en aller/retour, comme un ultime bonus à cet acte 5. Marc connaît déjà et ne souhaite pas renouveler l’expérience, alors il part en éclaireur au refuge suivant. C’est à 7h08, délesté du superflu, qu’avec Yannick, nous prenons la direction du célèbre pic qui nous toise de plus de 800 mètres. Le sentier se faufile d’abord dans un pierrier puis par une traversée ascendante bordée d’iris des Pyrénées tout en fleurs, passe au col de Suzon. 7h36 tout va pour le mieux. Le sentier se redresse à l’approche de la muraille, puis il vient buter au pied de la 1ière cheminée. 7h46 [46min39] nous y voilà.

 

En montant au col de Suzon

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Mer de nuage sur la vallée

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Un groupe français encadré par un guide s’est déjà engagé dans cette première difficulté. Le guide assure le groupe avec une corde. Nous enfilons le casque et l’on s’engage. La cheminée est un goulet étroit qui remonte une fissure. Un pieu métallique est incrusté dans la dalle pour en faciliter la sortie. Dans le sens de la montée, bien que technique (pas de III) ça passe, mais le retour sera surement bien différent. Nous doublons rapidement le groupe et passons devant. On tombe ensuite sur une zone composée d’éboulis et de pelouse. Nous avons beau lire et relire le topo, la suite qui conduit à la seconde cheminée n’est pas très claire. Le topo ne mentionne même pas la possibilité de s’égarer, alors même qu’il y a des sentes dans tous les sens et pas la moindre balise de peinture. Et ce ne sont pas les trop nombreux cairns qui vont nous aider. Par dichotomie, nous finissons par en déduire l’entrée. Ce n’est pas une cheminée mais plus exactement un couloir croulant avec un bloc coincé. Bien que très vertical, c’est plus dangereux pour les chutes de pierres que difficile techniquement. Le topo mentionne ensuite une altitude et une direction pour trouver la base de la 3ième cheminée. Cette fois c’est pire que tout. On se trouve nez à nez avec une face qui présente au minimum 3 cheminées. Quelle est la « nôtre » ? En suivant l’indication du topo et les cairns sur le terrain, nous nous engageons dans une cheminée, mais sans conviction. Le topo indique une précision importante, peut-être la seule qui vaille : repérer à main gauche la croix à la sortie de la cheminée. Nous escaladons celle-ci qui devient de plus en plus technique, et avant d’aller trop haut j’aperçois la croix sur ma droite. Nous ne sommes pas où il faudrait être. Le groupe que nous avions doublé prend notre direction, quand le guide leur crie : « Ne suivez surtout pas les cairns ». Je suis en rage. Non seulement nous venons de perdre du temps, mais en plus nous aurions pu être en danger. C’est quoi ce topo ! C’est quoi ce sommet ! Je suis sur le point de renoncer. Ce sommet n’est clairement pas pour randonneurs. Pourtant, nous allons croiser deux jeunes adultes en basket et sans casque, mais ils sont agiles ! Comme quoi on peut tout voir. Ce sera un groupe d’alpinistes espagnols qui va nous indiquer la 3ième cheminée, car il n’y a pas le moindre cairn. Elle n’est pas plus évidente que celle que nous venons d’emprunter, par contre elle est large d’au moins 5 mètres et ça passe partout, si on n’a pas peur de mettre les mains. Avec une telle largeur, le terme de cheminée est usurpé. Enfin, passons ! A présent, la croix totalement invisible à la base, se trouve en effet sur notre gauche, quand nous débouchons à la sortie. Quel soulagement ! Il est 9h37 et voilà quelques 2h18 que nous grimpons.

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Néanmoins le sommet n’est pas encore acquis, il faut pour cela gravir un peu plus de 200 mètres dans une sorte de pierrier d’altitude. Au moins cette fois il n’y a plus de doute quant à la direction à prendre. Par contre, en cas de brouillard, je ne serai pas aussi confiant. Toujours pas de balise et des cairns qu’on a envie de détruire tellement ils sont inutiles, voire dangereux.

 

Dans le rein de Pombie

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Enfin, par une traversée aérienne où il faut à nouveau mettre les mains, nous voilà sur le faîte du pic du midi d’Ossau, culminant à 2884 mètres. Du fait de son isolement, l’Ossau permet de jouir d’un panorama à 360°, lacs et vallons, ainsi qu’un chapelet de sommets de l’Anie à l’Ouest au Balaïtous à l’Est. Nous avons gagné ce panorama à 10h10, après 2h47 d’ascension dantesque. Le temps clair permet de profiter pleinement de ce si vaste panorama. En ce jour de fête nationale, Yannick va interpréter quelques airs populaires à l’harmonica. Enfin le moment de détente tant attendu. Nous sommes seulement 13 personnes au sommet, étonnant pour une telle journée, mais tant mieux pour tous.

 

Vue vers l'Est sur les étangs d'Ayous

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Vue vers l'Ouest

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Summit !

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A 10h40 il est l’heure de prendre congé du sommet. Si la première partie du retour se passe sans soucis, notamment la cheminée avec la croix, il en va autrement pour la seconde. Même problème pour trouver l’entrée qu’à la montée. C’est incroyable comme tout se ressemble et qu’un précipice peut ressembler à un autre précipice. La trace GPS de la montée va nous mettre dans la bonne direction. Cette seconde cheminée se désescalade facilement par de bonnes prises. La dernière cheminée, la 1ière à la montée donc, la plus technique, se présente enfin. De prime abord, un rappel aurait été le bien venu. Il faudra faire sans, c’était notre choix. Quelques reptations fessières, quelques trous dans le pantalon, une bonne dose de stress, plus quelques contusions, et à 12h05 [4h12] nous sommes afin posés sur le plancher des moutons. Une corde de 30 mètres aurait eu raison de tout ça. A savoir pour une prochaine. Cap sur le refuge. 12h42 c’est fait et voilà la première moitié de journée qui se conclut en 4h49. Repas à avaler, rassembler nos affaires, faire le plein d’eau et départ pour la seconde moitié de journée à 13h45.

 

Au revoir Pombie

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Les liaisons entre vallées se font en passant par des cols ; le suivant se trouvant sur notre route se nomme Peyreget. Sous le lourd soleil et la digestion, l’ascension du col s’effectue piano piano ; il faut retrouver un rythme de marche régulier. Nous n’avons pas notre métronome. Le sentier menant au col n’est pas bien long et est franchi à 14h24 [5h28], puis sans tarder, nous engageons la longue descente. Une de plus.

 

L'Ossau depuis le col de Peyreget

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A part un vilain pierrier s’écoulant du versant Sud de l’Ossau, le sentier est bien tracé. Cette fois, pas de risque de s’égarer. La météo est si stable que même les vautours fauves ont du mal à passer les cols ; c’est une journée en altitude exceptionnelle. Puis nous faisons la découverte d’un nouveau lac, celui de Peyreget. Ce lac est également dominé par l’Ossau qui est omniprésent. Pourtant, à part la masse imposante du pic, le paysage est tout de douceur. Toujours autant de fleurs au bord du sentier, et des iris des Pyrénées, toujours, toujours plus, comme le symbole de cet acte.

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Lac de Peyreget

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Dans notre dos Ossau et col de Peyreget et pic de Peyreget

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A part les fleurs et les marmottes, nous ne verrons rien d’autre dans ce qui s’appelle le P.N.P, Parc National des Pyrénées, et où tout y est interdit ; du bivouac au VTT, du chien en laisse en passant par le parapente, juste le marcheur y est simplement toléré. A méditer, quand on connaît le massif de Madres (Aude/PO) où toutes ces règles n’ont pas cours et où la faune sauvage y est la plus dense et la plus riche des Pyrénées. Notre marche nous conduit sur le plancher du torrent Bious-Artigues, puis au pont de Bious, point le plus bas du jour. Il est 16h14 et nous cheminons depuis 7h08.

 

Prairies de Bious

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La montée au lac d’Ayous et à son refuge mérite bien l’engouement qu’elle suscite. Il faut dire que la perspective du pic du Midi d’Ossau posant son imposante masse sur le miroir du lac Gentau est l’un des plus admirables spectacles des Pyrénées Occidentales. Le panneau signalétique indique le refuge d’Ayous à 3,5km en 1h45 pour 400 mètres de dénivelé. Yannick a des fourmis dans les jambes, il veut avaler cette ultime rampe en moins d’une heure. Ah la fougue de la jeunesse ! Allez, je relève le défi, mais sans faire la course. La première partie s’effectuant dans la fraicheur d’une belle forêt de hêtres, permet de monter en régime rapidement. Puis, comme il est de coutume à présent dans le Béarn, sans transition on aborde les alpages. Le sentier parfaitement tracé permet de monter vite, très vite même. Un étang, puis un second et je mets Yannick sur orbite pour atteindre son objectif horaire. Il se met à courir à présent, je fais de même pour ne pas en être de reste. Il faut dire que la perspective d’une baignade dans le lac Gentau donne des ailes. Et c’est donc au pas de course que nous parvenons au refuge d’Ayous à 17h09, concluant cette journée de 8h01 de marche. Nous mettrons 53 minutes pour effectuer l’ascension, exactement la moitié du temps indicatif. Pour l’anecdote, la seconde partie de la journée, bien plus longue que la première, est bouclée en 3h12. La qualité du sentier y est pour beaucoup.

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Marc nous attend à la terrasse du refuge. Il nous demande nos impressions sur l’ascension de l’Ossau : « infâme » lui dis-je. Peut-être que la mésaventure des pics d’Enfer est encore trop présente pour en apprécier toutes les subtilités. Nous finissons dans le lac comme nous l’avions imaginé. Ce bain face au majestueux Ossau est un pur moment de bonheur. L’eau nous semble bien plus chaude que la veille, alors on ne se prive pas de faire plusieurs longueurs. C’est le moment de laver l’homme et sa tenue. Yannick le raton laveur lavera même ses vêtements propres. (sic!)

 

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Le repas est servi à 18h45 car il y aura deux services. C’est aussi le moment où la brume de la vallée décide d’envelopper le site, comme pour tirer le rideau sur un décor majestueux que nous retrouverons après une nuit de sommeil. En ce jour de fête nationale, une surprise nous est réservée. Une sympathique et inattendue soirée animée par un spécialiste sur le thème du retour du loup en France, se prénommant Eric. Retour du loup, ainsi que la problématique avec les éleveurs dans les Pyrénées. Son expertise va nous donner un autre regard moins naïf sur les enjeux d’un tel retour, et la confrontation de l’emblématique animal avec le monde rural. Il ne juge pas, il relate avec beaucoup de pédagogie. On le sent passionné, il est passionnant. Il n’y a rien de tout blanc ou tout noir ; il faudra du temps pour que chacun trouve sa place, et surtout beaucoup de tolérance. L’allemand pointilleux de la veille se trouve également dans le refuge ; il ira se coucher sans profiter de cette animation, ce qui nous donnera l’occasion de rire à nouveau sur le côté rigide de notre cousin le germain. Tout le monde au lit après 22 heures. Cet acte touche peu à peu à sa fin.

 

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La journée en chiffres :

Temps de marche : 8h01 - Distance : 19km - Vitesse : km/h

Dénivelé positif : 1589m - Dénivelé négatif : 1717m

Altitude maxi : 2884m - Altitude mini : 1599m

 

 

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17/01/2017
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