Etape 4 : Arles sur Tech - Refuge de Mariailles
Dimanche 14 juillet 2013
Etape 4 : Le pla de Bernadou - Arles/Tech - chemin des Simiots - via le GR 10 col de la Descarga - Col de la Cirère - Ras del Prat Cabrera - Crête du Barbet - Porteille de Valmanya - pla de Cady - cabane Arago - refuge de Mariailles
C’est incontestablement l’étape la plus longue et la plus difficile physiquement de ce parcours. Elle s’effectue normalement en trois jours si l’on suit strictement le GR10. Mais, en acceptant d’avaler plus de dénivelé depuis le col de la Cirére, et en suivant la crête de la Serra del Roc Négre, on raccourcit ainsi les distances, permettant de réaliser 3 étapes dans la journée. Un vrai défi ! Alors pour le relever, le réveil sonne à 4h, avec un départ à la frontale. Notre endurance va être mise à l’épreuve. Il est 5h14. C’est aussi une course contre la pluie qui s’engage, et pour donner le plus de chance à notre défi, on va aller au plus direct de bon matin. On suit la route départementale jusqu’au village d’Arles-sur-Tech. Yannick connaît parfaitement un raccourci. Derrière les écoles, nous empruntons le sentier des Simiots jusqu’au pin parasol.
Au Moyen Âge des monstres fabuleux et des bêtes féroces sortaient des forêts pour emporter et dévorer les enfants dans les montagnes. Les Simiots étaient des monstres à corps de lion et à tête de singe qui terrorisaient les habitants du Vallespir. Quoi qu'il en soit la légende veut que les monstres aient disparu à l'arrivée des reliques de Saint Abdon et Saint Sennen rapportées dans un sarcophage (la Sainte Tombe d'Arles-sur-Tech), depuis Rome par l’abbé Arnulphe.
Au pin on emprunte un sentier de VTT qui nous amène, en une rampe et un long faux plat, au GR10. Le jour se lève et la pente s’élève. Et c’est parfois bien pentu. C’est très irrégulier en fait et ça rend ce chemin assez pénible. On arrive à l’ancienne station de minerai de fer de Jacouty, toute en ruine.
Grandeur et décadence d’une vallée qui n’en finit plus de se vider de ses richesses d’antan. Après avoir bien monté, le chemin va descendre un peu. Au niveau d’un torrent, il va se redresser définitivement. Heureusement, le passage à l’ancienne station des Vigourats, en ruine aussi, sera l’occasion d’une pause. Au fond du bâtiment se cache un minuscule refuge, où nichent 2 chauves-souris pipistrelles. Abri utile à connaître.
Pour le moment, la pluie n’est pas au rendez-vous, alors nous avalons avec entrain les redoutables dernières rampes menant au col de la Descarga. Nous y parvenons à 9h13, après 3h40 d’effort. Nous venons de gravir plus de 1100m de dénivelé. En temps « normal », ce serait la fin de la journée, puisque un refuge se trouve dans les anciens logements des mineurs d’autrefois. Mais pour Yannick et moi, cette journée ne fait que commencer. On prend aussitôt dans le talus pour arriver directement sous la fontaine de Batère. De là, nous sommes exactement sous les hauts sommets que nous devrions gravir.
Or de gros nuages noirs sont déjà accrochés aux cimes. Il n’est plus question d’emprunter cet itinéraire que devait être la Serra del Roc Négre, à cause des dalles au bout de la crête. S’il pleut, nous serions dans une impasse. Alors on se résout, par sécurité, à suivre le GR10 du balcon du Canigou. Encore un sentier que nous connaissons par cœur, parcouru en toute saison. C’est sans difficulté, mais très très long. Nous passons le col de la Cirère à 10h06, laissant à gauche l’itinéraire initial. Petit pincement de cœur, c’est le prix de la sécurité. Il nous aura fallu seulement une heure pour passer d’un col à l’autre. Suit ensuite la descente sur la maison forestière de l’Estagnol. Nous y sommes rendus à 11h03, après 5h08 de marche. On enchaîne sans attendre, la remontée jusqu’au refuge du Pinatell. Il est maintenant 11h52, et 5h50 d’efforts.
On se pose enfin, à la table extérieure de la cabane, et l’on va prendre le repas. Le refuge étant habité de punaises de lits, nous n’y rentrerons pas. Nous partageons la table avec 3 jeunes allemands en autonomie, forts avenants. Il fait encore beau à cette altitude, mais au dessus de 2400m il en est autrement. Alors à 12h40, on reprend notre marche que plus rien ne semble arrêter. C’est la plus belle partie du balcon que nous traversons à présent. Ici la flore est riche. Outre les inévitables rhododendrons, il y a des genêts purgatifs, indice du climat sous influence méditerranéenne, qui poudrent d’or une partie du versant amont ; on trouvera également une petite colonie de lis des Pyrénées dont le jaune éclatant est l’un des plus lumineux qu’il soit.
Dans chaque ravin coulent des torrents impétueux qui descendent des crêtes formant quelques centaines de mètres plus bas le torrent de La Lentilla. Cela rend notre marche plus joyeuse.
Il est 13h52, quand nous arrivons au Ras del Prat Cabrera, soit 6h56 de marche. Sans un regard en arrière, on emprunte le sentier dit « d’été » qui monte à gauche sur un épaulement du pic Barbet. La montée est brutale, droit dans la pente. C’est un itinéraire que l’on n’aime pas, tant la pente est forte et sans virage. Pourtant, aujourd’hui, on grimpe sans trop de difficulté. On reste sur le GR10 jusqu’au moment où celui-ci devient moins pentu et tourne à droite. Nous suivons alors une clôture qui monte jusqu’à la crête. C’est totalement hors sentier, mais sans difficulté. A 15h, je m’écroule ainsi que Yannick. Nous avons besoin de souffler vraiment. Cette pause que nos corps réclament est plus que nécessaire. On observe d’un regard, tout le chemin parcouru depuis le col de la Cirére. Et il reste encore beaucoup à parcourir ! Après ce repos indispensable, on enchaîne l’ultime montée sur la crête. Nous entrons alors dans le brouillard. Il fait froid, mais pas humide.
A 2500m on retrouve l’itinéraire venant du chalet des Cortalets. On aperçoit même en contrebas, au travers des volutes d’eau qui dansent dans les airs, les étangs des Estagnols. Nous franchissons le col du Barbet à 16h, après 8h36. Ouf ! Cette fois c’en est fini de la montée.
Au détour du col, nous tombons presque nez à museau avec quelques isards, les premiers de la traversée, mais, d’un bond, ils disparaissent dans l’épais brouillard. On passe la porteille de Valmanya et on plonge sur le plat de Cady. Nous allons faire la course contre la pluie et la montre, puisque le gardien de Mariailles impose d’avoir rejoint le refuge avant 19h. Tels les isards Catalans, on avale la descente avec agilité et vélocité.
Au plat du Cady on sort du brouillard. Juste après la cabane Arago, on quitte le sentier pour un raccourci qui nous fait gagner jusqu’à 20min. La traversée du torrent le Cady est une formalité. On pourrait se croire rendu, mais le long faux plat descendant qui va suivre nous paraît interminable. Plus on accélère la cadence, et plus cela nous semble interminable, d’autant qu’après le col Vert, la pluie vient s’inviter pour terminer la journée. C’est la plus intense fête nationale qu’il m’ait été donné de vivre. Enfin, à 18h13 nous mettons les pieds au refuge de Mariailles, en ayant respecté l’horaire fatidique. L’accueil est chaleureux. On met fin à une journée de 10h53 de marche. Nous savions que nous pouvions le faire, cette fois on peut dire : ON L’A FAIT. Pour paraphraser le célèbre aviateur Henri Guillaumet perdu dans la Cordillère des Andes : « ce que nous avons fait, jamais aucune bête ne l’aurait fait ». Nous sommes épuisés, occis, mais heureux. Après une douche chaude pour Yannick, froide pour moi, on passe à table à 19h15 exactement. On ne plaisante pas avec la ponctualité ici. Le repas est un délice et de grand appétit, on va finir tous les plats, rien ne repartira en cuisine. Qu’on se le dise, l’appétit de Yannick est insatiable. L’estomac enfin repu, nous partons nous coucher les jambes bien lourdes et la tête bien pleine de souvenirs.
La journée en chiffres :
Temps de marche : 10h53 - Distance : 37,6 km - Vitesse : 3,8 km/h
Dénivelé positif : 2664 m - Dénivelé négatif : 1359 m
Altitude maxi : 2646m - Altitude mini : 267m
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