Traversée des Pyrénées entre GR et HRP

Traversée des Pyrénées entre GR et HRP

Etape 38 : Refuge d'Ayous - Refuge d'Arlet

Samedi 15 Juillet 2017

Etape 38 : Refuge d'Ayous – col des Moines (2168m) – Astùn – col du Somport (1640m) – GR11 –  col de Causiat – ibòn d’Estanés – col d’Arlet (2095m) –  Refuge d'Arlet

 

Cette étape est une pure étape dans l’esprit de la H.R.P., clairement orientée Est/Ouest, avec recherche d’itinéraire, et très longue sur la carte. Ce matin, nous quittons définitivement Marc en ce qui concerne la partie randonnée, car il file plein Nord chercher son véhicule, pour nous récupérer dans 24 heures. L’itinéraire proposé par le Trek des Pyrénées pour se rendre au refuge d’Arlet se déroule entièrement en versant Français, et suit les méandres des vallées, et les plis de la montagne Béarnaise. J’ai donc choisit d’effectuer un tracé plus au Sud, sur le GR11, qui me semble sur la carte un tout petit peu plus court. Ça c’est la théorie, nous en saurons plus ce soir. Le départ est donné à 8h07, après une nuit un peu agitée, en direction du col des Moines.

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Le sentier est parfaitement indiqué et arrive rapidement sur un premier col sans nom d’où partent deux nouveaux sentiers. On se pose alors la question de savoir quel est notre itinéraire. Avec surprise il faut suivre celui qui perd du dénivelé et fait face à l’Ossau. Mais rapidement, par une traversée du talweg, nous tournons le dos au fier sommet et le sentier s’élève à nouveau, pour franchir cette fois le col des Moines à 9h12, pour 1h05 de mise en jambe.

 

En montant au col de Moines

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Lac Bersau

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Par ce col, nous passons une nouvelle fois la frontière. Le sentier descend jusqu’à l’ibòn del Escalar d’où prend sa source le rio Aragòn, qui donne le nom à cette grande province Espagnole. Au déversoir, le sentier plonge d’une traite jusqu’à la station de ski d’Astùn. C’est une belle station parfaitement intégrée dans son environnement, qui ne dénature en rien la montagne. D’ici, nous n’avons pas d’autre choix que de suivre la route goudronnée jusqu’à se rendre au col routier du Somport. Il est étrange d’atteindre un col en descente [10h39], c’est même une première. Mais nous ne le franchissons pas, on ne fait que le tangenter.

 

Ibòn del Escalar

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Et l’on poursuit la descente vers la station de Candanchù par un petit sentier qui permet de couper les virages. Dans la station de sports d’hiver, il s’agit de trouver les balises du GR11 et ainsi mettre le cap à l’Ouest. Chose faite jusqu’au terminus des pistes de ski, mais à notre grand étonnement, le GR11 semble avoir été détourné par rapport au tracé de la carte. Qu’importe, nous suivrons les informations de la carte, car le sentier est bien présent sur le terrain. Les balises ont été piquées au marteau, mais cela ne gêne en rien pour les voir. Il fait déjà très chaud. Sur ce tracé du GR11, le sentier fait une incursion en France, et seul le règlement du parc national permet de s’apercevoir de ce changement de frontière administrative. Nous faisons le plein d’eau à la première source que l’on trouve ; nous savons que l’eau potable sera rare sur cet itinéraire. Le sentier entre ensuite dans un cirque calcaire, tout en restant en balcon, dominant quelques abîmes sur notre droite. A 12h13, écrasés par la chaleur, on se pose à même le sentier, à l’ombre mais au frais. Sur ce versant Nord, le soleil nous cuit, mais sans lui le froid n’est jamais très loin. Cette matinée est bouclée en 3h35, et pratiquement la moitié de l’itinéraire déjà parcouru.

 

Au col de Causiat

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Le repas fourni par le refuge est frugal, juste la ration minimale pour un adulte. Il faudra bien y survivre. Finalement, comme il reste encore beaucoup de marche pour se rendre à destination, nous écourtons la pause et à 12h48, nous nous remettons en action. Le contournement de ce cirque s’engouffre dans la fraicheur d’une forêt de hêtres, grandement appréciée. Puis il quitte définitivement le couvert forestier et la France, au niveau de la borne frontière 293, pour évoluer exclusivement dans des pelouses bien vertes Espagnoles.

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Si jusqu'à présent, nous n’avions croisé que très peu de marcheurs, à partir de cet instant, il semble qu’un train vient de déverser des wagons entiers de voyageurs. Il en arrive de partout. Cela nous fait éclater de rire tellement cela semble irréel. Des marcheurs seuls, des couples, des familles, des camps d’ados, ça fourmille de toute part. D’où viennent-ils si nombreux avec un minuscule sac à dos et mal chaussés ? Où vont-ils ? Ces questions resteront sans réponses. Nous par contre, nous savons où nous allons par ce bon sentier : à l’ibòn d’Estanés. Nous parvenons au dessus de ses berges à 14h30, alors que nous marchons depuis 5h12.

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Ce bel étang ceinturé de pelouses est également une destination rêvée pour passer un agréable moment les pieds dans l’eau. Une légende raconte que ce lac serait une punition : les bergers auraient enfreint les règles sacrées de l’hospitalité envers un pauvre pèlerin de Saint-Jacques, égaré et affamé, identifié au Christ. Alors, les verts pâturages  auraient été noyés. Pas le temps pour nous de flâner, il nous reste encore 1/3 du chemin à parcourir. Et le soleil toujours présent, ne nous épargne pas. Le contournement par le Sud de cet étang, est assez pénible ; c’est fait de hauts et de bas, rien de pire pour casser un rythme. A l’extrémité de l’ibòn, nous retrouvons les balises officielles du GR11. Puis par un col sans nom, nous effectuons une plongée sur terrain accidenté. On arrive ensuite sur un plancher où coule le rio Aragòn Subordàn.

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Il nous faut à présent quitter le GR11 et remonter au col d’Arlet par un sentier qu’on ne trouve pas immédiatement. Existe-t-il réellement ? Comme l’indique un tracé sur carte, il faut suivre une courbe de niveau, sans aller marcher au bord du cours d’eau tortueux. Mais cette marche en dévers, sans sente, entrecoupée d’innombrables ravins, est insupportable. Ça n’a pas de sens de subir cela, pour seulement 40 petits mètres de dénivelé. Il faut se résoudre à marcher au plus bas de cette muraille de verdure, jusqu’à arriver à la verticale du col, malgré la perte de dénivelé. Nous devisons sur « notre » col. Est-il entre ces deux pics ? Plus à droite ? Plus à gauche ? Je décortique des yeux la carte pour la confronter à la réalité du terrain, et je commence à acquérir des convictions sur la position du col. Mais s’y rendre ne sera pas chose facile. Et ce soleil toujours si présent, oppressant, écrasant. Et le bleu intense du ciel, si bleu sans le moindre nuage. Tout devient exacerbé avec la fatigue. Je m’agace de ne pas trouver le sentier qui est reporté sur la carte. Je peste contre les vaches qui ont souillé le moindre fil d’eau, le moindre ravin où coule ce liquide précieux, source de vie. Surtout ne pas prendre d’eau ! Et la soif qui se fait sentir. La pente semble d’une verticalité vertigineuse. Or il n’en est rien. Même les nombreux iris des Pyrénées tout en fleurs n’arrivent pas à me distraire de cette fatigue et cette soif qui me ronge. Yannick prend les commandes, le GPS au poing, en ne quittant pas d’un mètre la trace se trouvant dans le précieux appareil. Nous finissons par mettre nos pas dans le sentier qui monte au col d’Arlet. Un isard nous domine sans crainte et semble intrigué par ces deux personnages qui avancent si maladroitement. Le premier isard depuis bien longtemps, et en plus hors du PNP. Quand on pense que dans les Pyrénées Catalanes on peut en approcher plus de 100 à la journée ! Qu’elle est loin notre région natale.

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Le col n'est plus très loin

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Le final de cette ultime ascension journalière est vraiment raide. Nous sommes tellement épuisés que l’on a du mal à apprécier le superbe décor qui nous entoure. Dans notre dos, une muraille de calcaire, la Sierra de Bernera, a des allures de Sierra de Cadì en Catalogne, mais avec des couloirs bien plus réduits ; la seule différence vient du fait qu’il n’y a pas le moins pin à crochets, sinon le mimétisme serait parfait.

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Nous avons la pression de l’horaire pour arriver au refuge avant l’heure du repas. Aucune pause n’est tolérée malgré la fatigue, un pas, un pas de plus, toujours plus haut. A 18 heures, les 2098 mètres du col d’Arlet sont franchi ! Je suis occis. On vient de se faire lyophiliser. Mais nous savons que l’horaire sera respecté. Ouf ! C’est la frontière que l’on traverse à nouveau pour un retour en France. Cela fait 8h33 que nous marchons. Le refuge est à deux pas sous le col. Nous y sommes rendus à 18h12, ce qui conclut cette journée de 8h43 de marche soutenue. Une journée dantesque, encore une !

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Au centre de ces alpages, au bord du lac, le refuge d’Arlet accueille les randonneurs qui suivent le tracé de la Haute Randonnée Pyrénéenne ou la Senda de Camille. Mais il est également une belle destination pour les familles désireuses de faire découvrir l’expérience d’une nuit en montagne aux plus jeunes. A ce jeu de la découverte, les espagnols sont les plus nombreux. L’accueil par la gardienne est chaleureux ; elle ne nous met en rien la pression pour le repas. Là encore, pas de douche, c’est l’étang qui assure cette tâche. Ce n’est que mieux. Et on ne va pas se faire prier pour aller nager dans la fraicheur de cette eau pure. C’est la séance réhydratation tant attendue. Cette baignade vivifiante est un pur bonheur. Comme chaque soir depuis 3 jours, vers 18h30, la mer de nuages monte brutalement de la vallée envelopper le refuge et son plan d’eau. Comme un rituel immuable, cela sonne l’heure du repas. A 19 heures on se met à table pour engloutir un repas copieux composé d’une bonne soupe de légumes, de pates et de bœuf en sauce. Yannick ne laisse pas sa part au chien, il en oublierait même de partager le supplément. C’est que ça mange un jeune sportif de 42 ans ! La soirée se poursuit avec Eric, le sympathique conteur rencontré la veille, mais ce soir le thème sera celui de la géologie des Pyrénées. Il est très patient avec les jeunes espagnols bavards, et ses explications métaphoriques, entre un flan au chocolat et le magma terrestre, font merveilles. Un vrai pédagogue. Un melon sera mis aussi à contribution pour détailler les forces titanesques qui ont engendré nos Pyrénées. Encore une belle soirée surprise, on y prendrait goût. L’heure du coucher est un rapport de force avec les familles espagnoles bruyantes se sentant comme à la maison, sans respecter le repos d’autrui. Il faut dire que c’est un dortoir unique de 37 places. Allant contre nature, je dois me fâcher quand l’un d’eux ouvre la fenêtre sans rien demander à la communauté. C’est aussi ça les étapes en refuge. Demain, nous quitterons cet acte en plein cœur du vert Béarn. L’océan se rapproche plus que jamais.

 

Première partie en France

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Seconde partie en Espagne

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La journée en chiffres :

Temps de marche : 8h43 - Distance : 28,1km - Vitesse : km/h

Dénivelé positif : 1275m - Dénivelé négatif : 1353m

Altitude maxi : 2203m - Altitude mini : 1573m

 

 

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17/01/2017
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